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Point de bifurcation

Je ressens avec intensité le fait que nous vivons un moment historique... que le mouvement « Occupy Wall Street » n’est que la suite du mouvement qui a débuté en Tunisie.

Ce pourrait-il que, ce que nous avons appelé le printemps arabe, soit le début d'un printemps global de l’humanité ? Que le printemps occidental qui commence serait bientôt suivi d'un printemps asiatique ? Se pourrait-il que ce soit en fait le printemps du monde de nos enfants, l’émergence d’un mouvement par lequel l’humanité exigera que notre société cesse de détruire ce monde du futur qui ne nous appartient pas ?

Ce pourrait-il que, ce que nous vivons actuellement soit en fait la fin d’une époque, celle de la croissance et de la cupidité laquellei a débuté en 1714 avec la publication de « La fable des abeilles: les vices privés font le bien public » par Bernard Mandeville et qui s’est confirmée en 1776 avec la publication de "La richesse des nations" ce livre fondateur de l’économie de marché dans lequel Adams Smith confirmait que la cupidité c’est bon (« Greed is good ») et qu’une main invisible assure le maintien de l’équilibre du système, cette main invisible dont l'absence devient chaque jour plus douloureuse ?

Alors que les Magrébins ont, au printemps, annoncé la fin de leur acceptation d’une tyrannie supposée les protéger du colonialisme, au prix de leur liberté et de leur droit de vivre, les Occidentaux n’annoncent-il pas actuellement la fin de l’acceptation d’une tyrannie financière censée leur apporter une qualité de vie, mais au prix de leur esclavage à la consommation, de leur endettement jusqu'à une mort économique annoncée et de la destruction de la biosphère qui les nourrit ?

La pensée est en mouvement. Les discours alternatifs émergent partout, aux endroits où on s’y attendrait le moins. Les journalistes cessent de se faire les promoteurs du système économique actuel pour en devenir les critiques avertis. De nouvelles références apparaissent souvent portées par la toile et ses réseaux multiples alimentant une réflexion nouvelle et intensément globale.

De plus, nous vivons actuellement trois changements de paradigme simultanément. 1. Un changement de paradigme économique -- la fin du capitalisme néolibéral 2. Un changement de paradigme scientifique -- la révolution du systémique et complexe 3. Un changement de paradigme culturel -- la révolution noétique

Dans ce contexte, la prise d’action des citoyens pourrait bien être le début d’un point de bifurcation dans le développement de la société telle que Monsieur Ilya Prigogine l’a introduit dans sa théorie des structures dissipatives.

Si c’est le cas, et tout me dit que c’est le cas, alors le mouvement « Occupy Wall Street » est un événement historique bien plus important que celui du 11 septembre 2001. Il annonce la métamorphose de notre société adolescente, qui a découvert le pouvoir sans intégrer l'imputabilité (1700 à 2000), vers son état adulte et mature (prochain millénaire) qui lui doit intégrer l'imputabilité pour pouvoir devenir durable. Il nous reste à souhaiter que la délinquance de la société ayant caractérisé la fin de sa période d'adolescence n’aura pas trop abîmé la biosphère et, ce faisant, réduit les potentialités de sa période adulte.

Mais, une chose est certaine, pour que les générations futures ne gardent pas un trop mauvais souvenir de notre période, il est urgent d'agir, de joindre le mouvement de prise de conscience et de consacrer une portion significative de notre créativité à trouver, dans la mesure de nos moyens, comment nous pouvons inventer une société écohérente, une société dans laquelle l'économie fonctionnera de manière cohérente avec l'écologie.

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