Je me prépare à relancer le projet d’écohérence ce qui fait que je vais prochainement recommencer à communiquer régulièrement sur ce blogue.
En attendant, je tenais à communiquer une information très importante que je viens d’obtenir et qui m’apparait comme un évènement très significatif alors que nous sommes en pleine négociation pour le COP21 et le TPP.
La nouvelle provient de l’« Energy Watch Group » l’EWG, un organisme de l’Europe du Nord, hautement crédible, de surveillance de la fonction énergie de la société planétaire. C’est un groupe que je suis depuis des années, car il fait partie de mes références scientifiques et objectives en énergie.
Ils ont publié une analyse en septembre dont la traduction en anglais vient de paraitre et qui affirme, preuve à l’appui, que l’Agence Internationale de l’Énergie (IEA), une filiale de l’OCDE, désinforme le public. L’IEA est un organisme qui a pour mandat d’aviser les leaders politiques et économiques occidentaux et mondiaux sur la réalité énergétique mondiale présente et future, de faire des projections de consommation et de production. Le World Energy Group conclut que l’IEA désinforme sciemment les populations civiles afin de freiner le développement des énergies renouvelables en produisant systématiquement des projections qui démontrent notre dépendance envers les énergies fossiles en sous-estimant systématiquement et de manière extrême les projections de développement de l’industrie des énergies renouvelables.
Il faut dire que l’IEA publie année après année un document de projection, le « World Energy Outlook » le WEO. Ce document est la référence centrale dans la prise de décision des décideurs économiques et politiques occidentaux et internationaux. Donc y tordre de l’information a beaucoup d’importance et d’impacts. En fait c’est inacceptable!
Pratiquement, l’IEA cache une vérité. Celle concernant le fait que la vitesse de développement des énergies durables est suffisante pour nous rendre à 60 % autonome des énergies fossiles dès 2030 alors que l’IEA prédit que cette autonomie ne sera que de 14 %. C’est une différence fondamentale de perspective qui détermine aussi une différence fondamentale dans la manière d’évaluer les priorités d’investissement des gouvernements et des industries. Et cette désinformation dure depuis des années.
Voici quelques exemples, extraits du rapport, qui démontrent l’ampleur et la durée de la volonté de désinformation :
En 2010, le rapport projetait que la production de panneaux solaires atteindrait 180GW en 2024 alors que cette production a été atteinte en 2015. La croissance réelle a ainsi dépassé de trois fois la croissance projetée par le WEO
La capacité éolienne de 2010 excédait respectivement de 260 % et de 104 % les projections du WEO 2002 et 2004
Les projections de croissance de 2002 à 2030 de l’énergie éolienne ont été rencontrées 20 ans plus tôt, soit en 2010
D’autre part, les rapports surestiment le potentiel des énergies fossiles ainsi que celui de l’industrie nucléaire.
Par exemple, malgré un déclin de l’industrie nucléaire depuis une dizaine années, le WEO projette toujours une expansion de 10Gw de sa présence dans la prochaine décennie.
Etc.
Le World Energy Watch Group conclut que : « D’un point de vue scientifique, ces erreurs structurelles sont tout simplement incompréhensibles, d’un point de vue social elles sont irresponsables. »
Voici un lien vers le communiqué de presse de Energy Watch Group, vous y trouverez le lien vers le rapport si ça vous intéresse.
Ce qui est toutefois le plus important dans cette nouvelle c’est qu’elle nous donne une idée du poids de la corporatocratie sur la démocratie. Et cette prise de conscience est fondamentale au moment où, d’une main nos gouvernements négocient le renforcement de l’État et de la démocratie à Paris, et de l’autre ils négocient le renforcement de la position des méga-corporations de la corporatocratie dans une multitude d’ententes de libre-échange avec l’Europe et avec l’Asie entre autres.
La corporatocratie est la force économique transnationale qui finance des élections dans probablement tous les pays de la planète et qui promeut le néolibéralisme et la concentration des richesses dans des organismes privés.
Ce billet de Yves Smith du site Naked Capitalism décrit bien la corporatocratie ainsi que son lien avec la négociation des grandes ententes internationales, ententes qui nous éloignent inexorablement du développement durable.
En ce qui concerne les négociations sur les changements climatiques, leur influence se fait sentir de multiples manières, mais une des formes qu’elle prend réside dans la limite de 2 degrés Celsius, qui est en fait trop élevée et devrait plutôt être de 1,5 degrés, ce que nous explique de manière très efficace Stéphane Foucart dans un article paru en juin 2015 dans le journal Le Monde. Encore ici on détecte la place d’une force globale qui influence le jeu en jouant sur la perception de la réalité.
Quoi qu’il en soit, il devient dorénavant primordialement important de comprendre que la corporatocratie, ce sur-État, est prête à tordre la vérité d’une manière qui pourrait détruire l’humanité pour assurer sa croissance sans fin. Qu’en fait, elle le fait tous les jours! Il devient donc primordial, pour les sociétés démocratiques, de concentrer le regard de leurs journalistes et de leurs analystes pour mettre de la lumière sur les réels enjeux du projet néo-libéral de croissance, de privatisation et de concentration à tout prix qui s’expriment non seulement par les ententes de libre-échange, mais par les politiques économiques en général.
L’avenir de nos enfants en dépend!
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